La marque de commerce de l’entrepreneuriat est l’incertitude entrepreneuriale. Entreprendre, c’est mettre en place un projet d’affaires, sans savoir quelle en sera l’issue. Ainsi, en prenant la décision de transformer une simple idée en un réel projet d’affaires, l’entrepreneur fait un saut délibéré dans le monde de l’incertitude.  

Or, on peut se demander comment les entrepreneurs qui y ont plongé vivent cette nouvelle réalité d’incertitude. Tremblent-ils de peur ? Au contraire, se sentent-ils stimulés par le risque ? 

Bien plus peureux que vous ne le croyez ! 

Une croyance populaire veut que les entrepreneurs seraient tous des amants du risque. Ils seraient donc stimulés par le risque. Parfois, on va même jusqu’à dire qu’ils auraient un goût pour le risque et qu’ils le rechercheraient éperdument. 

Rien de plus faux ! 

Bien que je m’efforce de briser ce mythe, on continue toujours à dépeindre les entrepreneurs comme étant des surhumains pour qui la prise de risques serait quelque chose de naturel et d’agréable. Incroyable ! 

Non, les entrepreneurs ne sont pas des amoureux du risque ! Il n’y a pas de lien entre le fait d’avoir un profil entrepreneurial et le fait d’aimer prendre des risques.  

 Une étude a d’ailleurs démontré que les entrepreneurs avaient une aversion au risque comparable au reste de la population (Miner & Raju, 2004). Ces résultats convergent avec mes données cliniques recueillies en coaching. Donc, les entrepreneurs n’aiment pas plus le risque que n’importe qui d’autre ! 

 Entreprendre, c’est accepter l’incertitude et la gérer 

Cela dit, les entrepreneurs réagissent différemment par rapport au risque et c’est là toute la différence. Le risque ne leur est pas moins inconfortable que pour le reste de la population, mais ils ont tendance à l’affronter et à le gérer pro activement. 

 Les entrepreneurs acceptent le risque et ne tentent pas de le fuir. Ils le voient comme faisant tout simplement partie de la réalité. Devenir entrepreneur est donc synonyme de choisir de travailler malgré le risque, dans le but de réaliser un projet auquel on tient. 

 Incertitude = catastrophe ? 

Tout entrepreneur vit un trac au moment de faire le grand saut. Tout comme au théâtre, le trac est normal en entrepreneuriat. Cela dit, certains ont une peur démesurée du risque qui les freine dans leur évolution entrepreneuriale. 

 Mon travail de coach en démarrage d’entreprise est d’explorer cette peur avec eux. La plupart du temps, cette peur est faite d’un fantasme cauchemardesque absolument irrationnel. En discutant de cette peur avec eux, les entrepreneurs se rendent compte que les chances de voir leur projet tourner aussi mal que dans leur scénario catastrophe sont improbables.  

 La peur de l’incertitude est toujours associée à quelque chose de bien précis dans l’esprit d’une personne. Lorsqu’on creuse un peu, on trouve toujours une situation redoutable sous-jacente à cette peur du risque. En levant le voile sur cette situation-fantôme, elle perd généralement beaucoup d’emprise sur la personne.  

 Incertitude = perte de contrôle ? 

Aux peurs irrationnelles associées à l’incertitude s’ajoute une fausse croyance bien tenace. Plusieurs entrepreneurs croient que l’incertitude est associée au manque de contrôle ou encore, à la perte de contrôle.  

 À vrai dire, c’est tout le contraire ! Ne pas pouvoir anticiper clairement l’avenir de son projet d’affaires ne signifie aucunement une perte de contrôle en cours de route. 

 Le principe est exactement le même que celui la conduite automobile. Qui est en mesure de dire avec précision à quelle vitesse il roulera sur l’autoroute ? Ou encore, combien de changements de voies seront effectués tout au long du trajet ? Combien de fois devra-t-on ralentir ou accélérer ? Combien de chauffards mettront en danger votre sécurité avec des changements de voies maladroits ? 

 La plupart des gens ne se posent jamais de telles questions avant de prendre le volant. Ces questions sans réponse ne soulèvent pourtant ni le doute, ni la crainte. Le conducteur de l’automobile ayant une expérience de route, il s’y fie ! Tout simplement ! Il fait confiance à sa capacité de réaction dans les diverses situations qui se présenteront à lui. 

 Le conducteur a confiance en sa compréhension de la route, en ses réflexes, en ses habiletés de conduite et en son véhicule. Cette confiance a pour effet de reléguer la conduite automobile au rang de simple banalité du quotidien. N’est-ce pas ? Personne n’y pense vraiment au fait. 

 La démarche entrepreneuriale n’a rien de différent de la conduite automobile. L’entrepreneur qui se lance en affaires fait face à un lot de questions sans réponses. C’est tout-à-fait normal. Cela ne signifie pas pour autant qu’une fois dans l’action, il ou elle prendra nécessairement la mauvaise décision. Bien au contraire, une fois dans l’action, nos réflexes décisionnels ont tendance à nous surprendre ! 

 Incertitude, expérience et résilience 

Toujours avec l’exemple de la conduite automobile, on peut dire que le conducteur qui a dix ans d’expérience a généralement une meilleure conduite que le novice. C’est donc normal qu’il ait une meilleure conduite et de meilleurs réflexes. 

 Il va en de même pour l’entrepreneur novice. Il ou elle ne prendra pas les meilleures décisions à chaque coup. Il ou elle fera des gaffes qui lui couteront de l’argent et qui écorcheront sa confiance et parfois même, son estime. Apprendre à entreprendre, c’est comme apprendre à marcher. On tombe, on se blesse, on se relève. 

 Fuir le risque et aller vers la sécurité et le réconfort sont des comportements naturels, liés à notre nature humaine (Ellsberg, 1961). Accepter le risque est donc quelque chose de contre-intuitif. Pour cette raison, faire face à l’incertitude est l’un des défis les plus difficiles de la démarche entrepreneuriale, pour ne pas dire l’un des plus gros défis humains. 

 Lorsqu’un entrepreneur prend la décision de se tenir debout face au risque et d’affronter l’incertitude, il ou elle commet un acte de résilience.  

 C’est cet acte de résilience qui constitue le moteur entrepreneurial d’une personne. C’est cet acte qui permet à un entrepreneur d’aller au bout de ses ambitions et de concrétiser son projet. 

 À chaque jour, je ressens un immense bonheur d’aider les entrepreneurs à progresser sur ce chemin d’apprentissage de la résilience face à l’incertitude. Bien plus qu’un simple trait entrepreneurial, la capacité de faire face à l’incertitude est un trait de résilience et par conséquent, d’humanité.  

Sur ce, je te souhaite d’affronter ta propre incertitude entrepreneuriale, entrepreneur de mon coeur !

Jean-Philippe

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